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l'atelier des filles
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21 juillet 2008

atelier n°18 - Inès

Au départ, ce n’était pas ça du tout.

Je veux dire, les choses sont imprévisibles parfois.

Je ne m’attendais pas à la révélation du siècle, même si ça avait plutôt bien commencé.

Il avait proposé un rendez-vous au resto.

Un bon point pour lui.

J’en vois déjà qui froncent les sourcils :

« c’est quoi son histoire de resto ? »

J’explique :

Un rendez-vous plus ou moins arrangé, on ne se connaît pas.

En général les mecs préfèrent vous inviter à prendre un verre.

Là, les fronceurs de sourcil tiquent :

« Ben quoi, c’est très bien, commencer par prendre un verre c’est très bien, histoire de se détendre. »

Se détendre, que dalle !

La raison est purement économique.

Un verre, c’est moins cher qu’un resto, voilà tout !

Pas la peine de risquer une soirée entière. On ne s’engage pas sur la seconde partie.

Un verre, on teste la marchandise.

Si l’investissement paraît bon, on se fend d’un dîner. Sinon, « ravi d’avoir fait ta connaissance, blabla d’usage, au revoir et merci. ».

La rencontre est pourrie, mais il a sauvé le porte monnaie, le mâle est satisfait.

Bon, là, en temps qu’ami d’ami, il s’est peur-être senti obligé. Pas vraiment la grande classe.

Ça, c’est mon côté pessimiste qui prend le dessus.

On peut aussi voir que d’autres ne l’aurait pas fait.

On va en conclure qu’au pire, à défaut d’être intéressant, c’est quelqu’un d’au minimum bien éduqué et au mieux, un gentleman intéressant.

J’ai passé toute la journée à me demander quelle serait la tenue la plus appropriée.

Plutôt sexy ? pas trop ?

Sérieux en uni, fraîche en imprimé pastel ?

Coiffure structurée ou libérée sauvage ?

Quoi qu’il en soit, une manucure s’impose.

Un petit gommage aussi.

Il faut prendre soin de soi.

Etre impeccable sans paraître trop apprêtée.

Le défi de toutes les femmes du monde.

Ne pas donner l’air que l’on est désespérée ni que l’on veut plaire à tout prix. Gare ! c’est peut-être le cousin de Quasimodo.

Mais attention quand même, on sait jamais…

J’ai quand même pris une heure et demie de marge pour me pomponner.

Parce que je le vaux bien !

Mais je m’agite à la vitesse de mes pensées.

En bref, je fais comme pour partir au boulot le matin : le lapin blanc « je suis en retard, je suis en retard… ».

Je m’agite, saute dans le premier jean qui me tombe sous la main.

Un coup d’œil dans la glace du hall en attrapant mon sac à main. Pas folichon, ma moue dubitative n’arrange pas le tableau.

Ascenseur.

On se ressaisie, on respire.

Méthode Quoe : « tu es belle, tu es lumineuse, tu es resplendissante ».

Voiture.

Méthode Quoe : « la lumière du soleil couchant pâlie face à ta beauté. Tu remplis l’espace, tu remplis le temps, tu rayonne ».

6 heures 25, arrivée devant le resto.

J’ai plus d’une heure d’avance.

Si je reste à poireauter dans la voiture, je vais fondre comme une vulgaire motte de beurre.

Fondant de fond de teint avec son coulis de mascara.

Non, ça l’fait pas !

J’opte pour l’option « un verre quelque part », mais en solo.

Ça me détendra…

Il n’y a que l’embarras du choix pas ici.

Ploum, ploum, ce sera toi qi me recevras au bout de trois 1,2,3, chichois, la crème au chocolat.

Non, celui là ça pas !

On rajoute une sauce aux anchois et hop, ça tombe sur ce magnifique bar lounge avec terrasse et palmiers.

C’est pas beau le hasard ?

Belle et vernie !

C’est magnifique, magnifique !

Je m’installe confortablement en terrasse dans un fauteuil club.

L’ombre des feuilles du palmier le plus proche joue à cache avec les rayons de soleil sur ma peau.

Le cocktail champagne fraise est une tuerie.

Tu rayonne, tu illumine.

Et le beau brun là-bas, près des escaliers, il rayonne, il illumine, il rayomine.

Choc.

Mon cœur fait un bond dans ma poitrine.

Ça fait tellement longtemps que je n’avais pas croisé quelqu’un qui me branchait un tant soit peu.

Le beau brun ne me branche pas, il m’électrocute.

Regards en coins, petits sourires.

Je maudis ma timidité tout en me rassurant, je lui plait c’est sûr, il va faire le premier pas.

Il va venir, il va venir.

Il regarde en coin, il petit sourire.

Il ne vient pas, il ne vient pas.

Le manège semble vouloir s’éterniser.

La méthode Quoe est oubliée, je me sens me ratatiner dans mon fauteuil club.

Je me dessèche et me lézarde, comme la croûte de son cuir au soleil.

L’heure tourne, j’ai rendez-vous, il faut que j’y aille.

Non ! Attends encore peu.

Il va venir, il va venIIIIR !

Toujours rien.

Là le retard devient indécent.

Je dois y aller.

Fin de l’illumination.

Je ne suis plus qu’une lamentable flaque visqueuse qui se traîne jusqu’au comptoir.

Dernier coup d’œil en arrière.

Dernière lueur d’espoir.

Il a l’air déçu.

Si, si, j’en sûre !

Enfin, je crois.

A moins qu’il ait été gêné pas le soleil ?

Ou l’olive qu’il était en train de manger n’était pas bonne ?

Tu rêve trop ma fille.

Je traverse la rue le plus lentement possible.

Sait-on jamais, peut-être bien qu’il regrette et qu’il va se lancer à ma poursuite.

J’arrive devant le resto.

Personne.

Je me poste, j’attends.

Avec le retard que je me paie, il a dû se barrer.

J’entends déjà Irène et le sermon auquel je vais avoir droit :

« Avec tout ce que je fais pour toi… te présenter des amis… pour qui tu me fais passer… ».

Toute absorbée dans mes réflexions, je ne l’ai pas vu s’approcher.

Sa voix m’extirpe de mes rêveries.

« Bonsoir, désolé pour le retard.

Vous ne le croirez sans doute pas, mais au départ j’étais en avance.

Du coup je suis allé prendre un verre.

Là j’ai croisé le regard d’une jolie brunette qui malheureusement pour moi n’a fait que me snober ».

Le beau brun du bar se met à rire. Il ajoute avec un sourire ultra-bright :

«  Irène était bien en dessous de la vérité dans sa description. ».

Non mais c’est quoi ce rire ???

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