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l'atelier des filles
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4 octobre 2007

atelier écriture n°3 Inès

Toute ma vie se trouve dans une valise.

Une petite valise en tissu écossais que j’ai hérité de ma grand-mère.

Je la range bien soigneusement sous le bureau bancal de la chambre d’hôtel où je vis.

Elle, elle m’attend toujours sagement, là, dans ma valise, puis sur ma table de chevet et dans mon cœur, toujours.

Lorsqu’enfin cessent les allers venus des inconnus, je chasse la crasse, je change les draps souillés.

Je tire mon bagage de sous son abri.

Je soulève délicatement le couvercle.

Elle m’attend, entre les tee-shirts et les pulls. Je la dégage délicatement de son écrin bon marché et son sourire tout à coup irradie, rempli la pièce, réchauffe mon cœur.

Son regard plein d’amour et de compassion se pose sur moi, chasse de cette chambre sordide et de mon esprit, tout le bruit, toute la violence et les humiliations qui les avaient envahis.

Je redeviens la petite fille de 8 ans.

Je me pelotonne à nouveau dans les jupes de ma grand-mère. Je sens sa main sèche et ridée caresser mes cheveux.

Je suis un petit chat alangui, heureux et confiant sur les genoux de sa vielle maîtresse.

Nous reposions ainsi des heures durant, dans le vieux canapé de velours vert éventré du salon.

Je sentais sur moi le regard tendre d’une vielle statue ébréchée de la vierge Marie qui enveloppait toute la pièce et ses occupants d’un amour sans condition, de l’amour de Mamita.

Voilà tout ce qui me reste d’elle.

Sa valise à carreaux et la statue de la vierge.

Je ne suis pourtant pas croyante.

Dieux et ses saints, je n’y crois plus depuis longtemps.

Depuis les foyers, depuis les familles d’accueil.

Depuis les larmes.

Je ne suis jamais sortie de cet enfer.

Je ne connais plus que la violence de la rue, les hommes qui paient, les hommes qui frappent.

Mais depuis mes 18 ans, depuis que l’on m’a remis mon héritage, le temps s’arrête parfois.

Je suis à nouveau ce petit chat ronronnant sur les genoux de sa maîtresse.

Chaque fois que j’ouvre ma valise, qu’elle me regarde et qu’elle me sourit. Je reçois l’amour d’une mère, l’espoir d’une vie, peut-être…

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